C


Aider ses ami.e.x.s qui ont parfois envie de mourir à ne peut-être pas mourir

mis en ligne le 4 juin 2023 - carly boyce

Un zine sur le soutien aux personnes suicidaires pour "les chelou.e.x.s, les tordu.e.x.s et les queers" écrit par carly boyce (2019) qui nous transmet ici les fruits de sa longue expérience en prévention du suicide. Cette ressource fabuleuse offre un tas d’idées et de conseils pour construire nos propres savoir-faire.

Ce zine peut s’avérer un outil extraordinaire pour organiser des discussions dans des espaces collectifs ou avec des proches afin de forger ensemble de meilleures pratiques d’entraide face au suicide, ou simplement pour réfléchir par soi-même sur le sujet. Il ne donne pas de solution toute faite, mais propose un cadre pertinent et bienveillant pour amorcer ces discussions complexes.

L’idée centrale étant que pour soutenir au mieux les personnes suicidaires, il faut d’abord apprendre à être à l’aise avec les discussions sur le suicide, donc apprendre à désamorcer nos peurs et nos tendances à esquiver le sujet, pour qu’il soit possible de rester véritablement proche et présent’e pour la personne qui en a besoin.

Ce zine a été traduit par ezekiel and the weirdos (2022). Vous trouverez la version originale en anglais ici : https://www.tinylantern.net/suicide-intervention-resources

Table des matières :

Introduction : Prévention du suicide pour les chelou.e.x.s, les tordu.e.x.s et les queers

Partie 1 : idées reçues/ mythes/ ces croyances qui ne nous aident pas du tout, mais sont très populaires
a. Parler de suicide avec une personne en détresse pourrait lui donner envie de se suicider
b. Il est possible de prédire quelle personne ayant des idées suicidaires va tenter de mettre fin a ses jours
c. Si tu as toi-même des idées suicidaires, tu ne peux pas aider une autre personne suicidaire
d. Il y a des expert.e.x.s qui sont formé.e.x.s a prendre en charge les personnes suicidaires et iels ont toujours raison
e. Tu devrais toujours faire ce qui est nécessaire pour sauver une vie, coûte que coûte

Partie 2 : les rouages – outils et stratégies pour accompagner les personnes suicidaires
a. Principes directeurs pour des discussions de soutien
b. Outils qui n’aident pas
c. Outils utiles et efficaces

Partie 3 : à lire/ regarder/ écouter pour en savoir plus

Remerciements


Salut, je suis carly, j’ai écrit ce zine.

Je suis un.e sorcièr.e queer et genderqueer et un.e colon blanc.he, qui a commencé à faire de la prévention du suicide en cinquième quand mes ami.e.x.s ont commencé à me dire qu’iels avaient envie de mourir. J’ai 35 ans maintenant, je suis thérapeute, animateurice et liseureuse de tarot, et parfois mes ami.e.x.s me disent encore qu’iels ont envie de mourir. Moi aussi, pendant longtemps j’ai eu envie de mourir, ou plutôt, j’étais réellement terrifié.e de ne pas savoir comment continuer à vivre. J’ai suivi une formation en pair-aidance, d’abord en tant que volontaire au Centre de soutien des étudiant.e.x.s victimes de harcèlement sexuel à l’université McGill à Montréal, au début des années 2000, un peu plus (mais pas tant) quand j’étais en école de travail social, et un peu plus pendant ASIST en 2015. J’ai été frappé.e par le fait que plus la formation est institutionnalisée, plus l’attention portée aux rapports de pouvoir et de privilèges diminue. Je crois sincèrement que l’oppression (misogynie, racisme, transphobie, homophobie, validisme, colonialisme) joue un immense rôle non seulement dans le profil des personnes qui risquent de vouloir mourir ou de mourir du suicide, mais aussi dans le profil des personnes qui ont accès à du soutien et des services autour du risque suicidaire. Je voulais engager des discussions avec celleux qui refusent de dénoncer leurs potes aux keufs, ou qui soutiennent des personnes qui ont eu des expériences vraiment horribles ou néfastes aux urgences et en HP, sur nos façons d’être présent.e.x.s pour les gens que nous aimons et notre communauté, lorsque des gens envisagent de quitter ce monde.

Salut, je suis ezekiel, j’ai majoritairement traduit ce zine !

Je fais de la prévention sur le suicide informelle depuis que j’ai 14 ans, j’en ai maintenant 20, et je vis aussi avec des idées suicidaires de façon cyclique. J’ai trouvé le zine de carly l’année dernière, quand je commençais à essayer de rendre transmissible ce que j’avais appris sur l’entraide entre personnes suicidaires. Ça m’a énormément aidé, et j’ai mis plusieurs mois à le traduire. J’espère que la version française pourra aider autant que la version anglaise m’a aidé.


Une canette de soda ouverte dont s’échappe des bulles, des bols de snacks à grignoter et un paquet de chips. Dessin en noir&blanc


Hello !

Merci d’avoir choisi ce zine ! Dedans, tu vas trouver un certain nombre de questions, d’idées et de stratégies pour accompagner les gens qui peuvent avoir des idées suicidaires.

En janvier 2016, j’ai développé un atelier appelé « Intervention sur le suicide pour les « tordu.e.x.s » (weirdos), les « taré.e.xs » (freaks) et les queers » pour me réunir avec d’autres personnes qui font du soutien sur le suicide dans leurs communautés et familles, et parler de comment nous le faisons, de nos peurs et de ce qui nous aide.

J’avais quelques idées, mais sincèrement j’avais surtout beaucoup de questions, et l’envie de préserver un espace avec des personnes qui ont des expériences similaires à la mienne.

Mon programme était principalement centré sur ces trois choses :

1. je voulais briser l’isolement (le mien et celui des autres !) autour de l’accompagnement informel des personnes suicidaires. Il est vraiment difficile de savoir qui est safe pour parler de ce genre de soutien, et il y a quelque chose de profondément guérissant et magique dans la possibilité de voir les visages et d’entendre les voix d’autres personnes qui ont, peuvent ou pourraient faire ce travail.

2. au sein de mes communautés, le travail de soutien tend souvent à peser sur un certain type de personnes. Les fems, particulièrement les fems racisées, et/ou handicapées font une quantité INCROYABLE de travail de care, et même si ces personnes sont des génies avec énormément de compétences à partager, je pense que ce serait super de partager un peu mieux ce travail. Ce sont des compétences qui peuvent être apprises, donc même si elles ne te viennent pas « naturellement », tu peux tout de même contribuer à ce travail.

3. penser et parler du suicide peut faire paniquer les gens. Notre système nerveux s’emballe comme si on devait échapper à un tigre, et c’est un état dans lequel il est complexe d’être présent.e.x et calme. J’espérais que ces ateliers permettent aux gens de faire l’expérience d’une conversation sans urgence sur le suicide, et que ce vécu puisse nourrir nos futures conversations de soutien aux personnes suicidaires.

Ça m’a donné de l’espoir

j’étais choqué.e de l’ampleur de l’attrait pour cet atelier, et pendant les trois dernières années, j’ai participé à environ cinquante cercles de parole, avec plus de mille personnes, majoritairement du sud de l’Ontario, mais aussi d’une poignée de villes éparpillées sur Turtle Island. On a parlé d’outils et de stratégies pour prendre soin de celleux que nous aimons et de nous-mêmes, et ces conversations ont été à la fois l’eau qui a nourri les graines que j’ai plantées, et les fleurs qui ont poussé de ces graines ; un réseau de personnes qui croient en l’autonomie, la compassion, la gentillesse, et la résistance à l’intervention par l’État et l’incarcération. Nous sommes interconnecté.e.x.s, nous sommes nombreuxes, et nous sommes puissant.e.x.s. Nous sommes déterminé.e.x.s à briser le lourd silence qui entoure le suicide. Toi aussi tu es plein.e.x de génie et de talents. J’espère que ce zine pourra t’aider à nommer les savoir-faire que tu utilises déjà, et peut-être à essayer deux ou trois nouvelles choses.

On ne peut pas tout faire, mais on peut faire quelque chose.

Mauvaise nouvelle : il n’y a pas d’ingrédient secret, pas de formule magique, qui garantira que touxtes les gens que tu aimes et qui pensent au suicide vont s’en sortir. Je ne crois pas qu’il y ait une méthode universelle qui fonctionne pour tout le monde. Ce zine est une collection de conseils, d’idées, de ressources, de questions, d’outils, et tu es invité.e.x à y piocher ce qui fonctionne pour toi et à laisser le reste de côté. La principale idée, c’est que la meilleure chose que nous puissions faire pour soutenir les personnes suicidaires, c’est d’apprendre à être à l’aise avec les discussions sur le suicide et à désamorcer nos réflexes de peur, pour pouvoir rester présent.e.x avec la personne qui galère. L’isolement, le stigma et le silence peuvent être fatals aux personnes en grande souffrance, donc ces savoir-faire et stratégies se concentrent sur le fait de rester présent.e.x, d’être un.e.x témoin empathique, et de créer un lien sincère avec les personnes qui traversent une période difficile. Lis la suite pour en apprendre bien plus sur la manière dont certaines personnes font ça.

S’il te plaît, sois douxe avec toi-même en lisant ce zine

Je me sentais nerveuxe à l’idée de publier ce zine, au lieu d’animer un atelier autour de ces discussions complexes. C’est en partie parce que ce sujet est super lourd, et je ne peux pas prendre soin émotionnellement de chaque personne qui feuillette ce zine, donc je veux juste prendre un temps pour te demander de checker comment tu te sens ! Est-ce que tu te sens stable ? Tu as une idée du type de sentiments, d’expériences passées et de sensations corporelles qui pourraient resurgir en commençant à penser à la prévention sur le suicide ? Y a-t-il quoi que ce soit que tu puisses faire à l’avance (là tout de suite !) pour prendre soin de toi pendant que tu lis ce zine ? Aimerais-tu le lire avec un.e.x ami.e.x près de toi ? Vous pouvez vous le lire à voix haute et débriefer au fur et à mesure. Est-ce que tu voudrais informer une personne qui t’aime que tu lis ce zine et que tu pourrais avoir besoin d’en parler ensuite ? T’es-tu bien reposé.e.x récemment ? Ton ventre est-il vide ou plein ? Aurais-tu envie d’un thé chaud ou une boisson fraîche pétillante ? Comment est ta respiration ? Les illustrations dans ce zine sont pensées pour être des petits rappels de checker comment tu te sens, donc quand tu arrives à un dessin, prends une minute et vois si tu as besoin d’une pause, de faire des câlins à un animal de compagnie, de parler avec un.e.x ami.e.x, de manger, ou de prendre une douche, sois douxe avec toi-même !


Partie 1 : idées reçues/ mythes/ ces croyances qui ne nous aident pas du tout, mais qui sont très populaires

Il me semble que les cinq idées ci-dessous prennent beaucoup de place dans notre conception du suicide et de la gestion du suicide, même si nous n’y adhérons pas totalement ! Comme à peu près toutes les idées, elles peuvent être en partie vraies dans certains cas, mais ne le sont certainement pas pour tout le monde ni tout le temps. J’en suis venu.e à penser que toutes ces idées, et particulièrement quand elles forment un ensemble, créent et renforcent un certain nombre de pensées et comportements vraiment néfastes ! En atelier, on aborde chacune de ces idées à travers trois questions : cela est-il vrai ? Qui croit cela et pourquoi ? Qu’arriverait-il si presque tout le monde croyait cela ? Sous chaque mythe, sont décrites certaines idées qui vont généralement avec ces croyances, ainsi que les problèmes que la généralisation de ces croyances cause ou pourrait causer.

a. Parler de suicide avec une personne en détresse pourrait l’encourager à se suicider.

• cette idée ne semble pas entièrement logique pour beaucoup de personnes, mais pourtant, quand quelqu’un.e.x qu’on aime dit des choses alarmantes, il n’est pas facile de demander directement à cette personne s’iel pense au suicide – peut-être avons-nous intériorisé ce message, même sans vraiment y croire ?

• pour moi, ne pas aborder ce sujet est bien plus risqué que de dire « hey, est-ce que tu penses au suicide ? » C’est difficile de savoir quel rapport au suicide entretient une personne si tu n’en parles pas avec ellui.

• poser cette question n’est pas intrusif. Tu n’es pas en train de forcer quelqu’un.e.x à parler du suicide s’iel ne veut pas. Iel peut dire non, iel peut mentir s’iel veut ! En abordant le sujet, tu fais savoir à la personne que tu es prêt.e.x à en parler. C’est une offre. Iel peut se saisir de cette opportunité à ce moment-là, ou juste retenir l’info que tu es à l’aise pour parler de suicide, en prévision du moment (dans des jours, des mois, voire des années) où iel aura vraiment besoin de parler.

• on peut céder à l’impression que les personnes suicidaires sont très très fragiles, et qu’on risque de les briser au moindre mouvement, au moindre mot de travers. C’est faux et injuste. Les personnes qui ont des pensées ou pulsions suicidaires, particulièrement lorsque c’est continu ou récurrent, sont littéralement des génies de l’art de rester en vie. Iels font ça tout le temps. Ne dévalorise pas le savoir-faire, la résilience, le pouvoir et la capacité d’action des personnes que tu soutiens !

• ça me rappelle la manière dont certain.e.x conçoivent la sexualité des ados – comme si ne pas en parler (ou en parler uniquement comme une chose terrible que personne ne devrait faire) ferait que les jeunes ne sauraient pas qu’iels peuvent faire du sexe. Les humain.e.x.s ont trouvé des moyens de sexer et de mourir depuis les débuts de l’humanité. Le silence ne fait qu’augmenter le stigma et la honte.

• quand nous avons peur de provoquer une crise en parlant du suicide, nous n’engageons *pas* de discussions avec les gens quand iels ne sont pas en crise, sur le type de soutien qu’iels souhaiteraient ou auquel iels pourraient consentir en cas de futures crises. Faire un plan de crise est BEAUCOUP plus difficile quand quelqu’un.e.x est déjà en crise. Il peut être extrêmement aidant de débriefer avec tes ami.e.x.s suicidaires après une crise, pour que tu aies plus d’idées et d’outils la prochaine fois (s’il y a une prochaine fois).

b. Il est possible de prédire qui, parmi les gens suicidaires, va essayer de mettre fin à ses jours

• les listes d’évaluation du risque médical (des questions comme : as-tu un plan ? Les moyens de réaliser ce plan ? Une date prévue ? etc) ont deux objectifs principaux :

1. Gatekeeper – il n’y a pas assez de places pour tout le monde, donc seules les personnes que l’hôpital perçoit et comprend comme légitimes (ce qui est en soit raciste, validiste et classiste) peuvent avoir accès aux soins ; et 2. éviter les litiges – les docteurs et les thérapeutes ne veulent pas être poursuivi.e.x.s en justice si les gens qu’iels suivent se suicident, donc iels ont besoin d’avoir quelque chose à montrer pour dire « j’ai fait ce que j’étais censé.e.x faire »

• cela dit, tout outil peut être utilisé pour guérir ou pour nuire, ça dépend de qui l’utilise et comment. Il est tout à fait possible d’utiliser cette liste de questions et d’évaluations formelles pour structurer une conversation avec une réelle intention de soin. C’est ok de vouloir s’appuyer sur un minimum de structure, quelques questions à poser pour lancer la conversation. Essaye juste de ne pas te laisser avoir en croyant que ces questions sont magiques, et que leurs réponses te donneront la « Vérité » sur ce qui se passe pour quelqu’un.e.x.

• beaucoup de tentatives de suicide sont impulsives, et ne peuvent donc pas être repérées par des outils comme ceux-là. D’autres vont penser au suicide et le planifier si souvent que ce genre de pensées et de plans n’indiquent pas forcément un risque accru.

• nous savons un minimum quel type d’évènements, de pressions et de circonstances peuvent rendre la vie invivable ! Quand quelqu’un.e.x que tu aimes traverse les répercussions d’un trauma, gère un gros changement, un deuil profond, se sent fortement tiré.e.x vers le bas par les dynamiques oppressives qu’iel subit, ça a totalement du sens de checker avec ellui comment iel se sent, et de poser explicitement la question des pensées suicidaires.

• parfois, nous faisons des suppositions fondées sur des dynamiques générales, ou des choses que nous avons apprises (ex : les jeunes natif.ves, queer et trans ont plus de chance de faire des TS et d’en mourir que les autres) ; et cela peut nous mener à ne pas croire ces personnes quand iels nous parlent de leurs expériences, sentiments et besoins (surtout si nous ne faisons pas partie dudit groupe). Cela peut mener à rejeter ce que ressent une personne que nous ne pensons pas à risque, à cause des stéréotypes entendus sur le groupe dont iel fait partie, ou à paniquer excessivement à propos de ce que ressent quelqu’un.e.x. Parfois, ce genre de stats nous font penser que nous connaissons mieux quelqu’un.e.x qu’iel ne se connaît ellui-même, ce qui n’est ni juste ni vrai ! Il faut toujours davantage croire la personne à qui tu parles, que les statistiques à son sujet.

• ça donnerait quoi si on faisait davantage confiance à notre instinct et à nos relations qu’à des listes basées sur des recherches vieilles de dizaines d’années et qui portaient principalement sur des hommes cishét blancs de classe moyenne ?

• j’en suis venu.e à penser que le meilleur outil d’évaluation des risques que nous ayons, c’est nos relations, donc le conseil que j’ai à te donner est de croire les personnes que tu soutiens lorsqu’iels déterminent leur niveau de risque et leurs besoins, et aussi de te croire toi-même si tu as le pressentiment que quelqu’un.e.x est en danger ou non.

c. Si tu ressens des envies suicidaires, tu ne peux pas aider un.e.x autre personne suicidaire

• y-a-t il un gouffre énorme entre les guérisseureuses et les personnes qui ont besoin de guérison ? (spoiler – NON) nous sommes touxtes à la fois amoché.e.x.s, brisé.e.x.s, capables de créer des liens et plein.e.x.s de possibilités.

• on ne croit pas ce genre de trucs pour d’autres sortes de savoir-faire. Imagine le même type d’affirmation dans un autre contexte : seul.e.x.s les gens qui n’ont jamais joué au basket sont à même de coacher une équipe de basket. Genre ??

• savoir que quelqu’un.e.x a traversé ou traverse quelque chose qui ressemble à ce que tu vis peut contribuer à briser la honte et l’isolement qui vont souvent avec le sentiment de désespoir.

• pour certaines personnes le travail de soutien est une stratégie de survie – offrir du soutien peut les aider à avoir le sentiment d’être en lien et que leur vie a un objectif ou un impact, qu’elle compte.

• cette idée sous-entend aussi que les personnes qui travaillent dans le social, dans les lignes d’écoute sur le suicide, dans le paramédical, les psychiatres, les urgentistes et un tas d’autres gens n’ont jamais été, ne sont pas et ne seront jamais suicidaires. Iels risquent leur taf s’iels admettent avoir elleux-mêmes été suicidaires.

• certaines personnes qui traversent ou ont traversé des difficultés peuvent ne pas avoir l’envie ou la capacité de soutenir d’autres personnes, périodiquement ou tout le temps – et c’est totalement ok. Tu es la seule personne qui détermine si tu te sens capable ou si tu as envie d’offrir ton soutien à quelqu’un.e.x d’autre, ou pas, et ton envie et ta capacité peuvent varier en fonction des jours et des circonstances.

d. Il y a des expert.e.x.s qui sont formé.e.x.s à prendre en charge les personnes suicidaires, et iels ont toujours raison

• les hôpitaux et les psychiatres peuvent vraiment aider certaines personnes, parfois ! Je veux que ces choses continuent d’exister. Mais comment on fait si ces systèmes sont violents envers toi ? S’ils ne te sont pas accessibles ? Pas safe ? Si l’aide institutionnelle est le seul type d’aide accessible, nous laissons beaucoup de gens sans soutien, particulièrement celleux qui sont invisibilisé.e.x.s ou jugé.e.x.s sans valeur par les systèmes de dominations en place.

• il y a quelque chose d’attirant dans cette idée, quand on se sent submergé.e.x.s ou hors de notre zone de confort, c’est rassurant de se dire que quelqu’un.e.x sait quoi faire. Mais si on est véritablement convaincu.e.x.s que différentes personnes auront différents besoins, et que le système médical occidental peut être extrêmement violent envers les personnes marginalisées, on ne peut pas juste se reposer sur les « experts ». Nous pouvons prendre conscience de notre propre expertise, de ce que nous savons de nous-mêmes, de nos relations, nos besoins, nos limites, ce qui nous aide à nous sentir mieux, ou plus en sécurité, ou juste un peu moins brisé.e.x. Tu es expert.e.x de toi-même. Les personnes que tu soutiens sont expert.e.x.s d’elleux-mêmes.

• la culture blanche colonialiste et le capitalisme ne savent pas quoi faire des personnes qui sont « trop » : trop malades, trop vieilles, trop souffrantes, trop pauvres, trop folles, trop à risque, trop effrayantes. Nous mettons ces personnes à l’écart, pour que des « expert.e.x.s » s’en occupent, et nous faisons en sorte d’ignorer leur disparition (en prison, en HP, en maison de retraite, en foyer d’accueil). Comment pouvons-nous apprendre (ou ré-apprendre) à garder ces personnes près de nous ? Qu’arriverait-il si nous n’écartions pas les personnes de nos communautés lorsqu’iels rencontrent des difficultés ? De quoi aurions-nous besoin pour soutenir les personnes qui traversent un moment vraiment difficile ?

e. Tu devrais toujours faire tout ce qui est nécessaire pour sauver une vie, quoiqu’il en coûte

• cette idée fonctionne un peu comme un récit « pro-vie » – ces gens désirent ardemment protéger un fœtus, mais ne mettent pas nécessairement autant d’énergie à faire en sorte que le futur enfant et adulte que deviendra ce fœtus vive une vie sans violence, pauvreté, insécurité alimentaire, isolement, etc. Garder nos proches en vie ne se résume pas à faire en sorte qu’iels continuent de respirer, ça demande de réfléchir aux circonstances qui ont les ont mené.e.x.s à ressentir cette douleur et ce désespoir.

• quand les gens parlent de « sauver une vie », iels veulent surtout dire « maintenir le corps de quelqu’un.e.x en vie et en capacité de fonctionner » - il n’est pas question de choses comme : une famille soutenante, une communauté safe, des amitiés, un emploi stable, un logement adéquat, une sécurité alimentaire, un accès à la spiritualité et aux rites, à l’éducation, etc. Qu’est-ce qui fait que la vie vaut la peine d’être vécue, et qui détermine ça ?

• à partir de quand on décide de ne pas tenir compte de l’autonomie physique de quelqu’un.e.x ? Considérons-nous le suicide comme un choix rationnel ? Pour qui et pourquoi ?

• À quelles vies accorde-t-on de la valeur ? Quelles vies sont constamment priorisées ? Quels corps protégeons-nous, et lesquels traitons-nous comme des jetables ? Pense au fait d’être racisé.e.x, handi, queer/TPG, dépendant.e.x, SDF, pauvre, natif.ve.

• qui sont les gens dans nos communautés qui se retrouvent souvent à faire le travail que touxtes les autres ont peur de faire ? Qui sont les personnes dont on attend qu’iels prennent en charge un travail émotionnel illimité et d’être toujours okay avec ça ? Est-ce que ce sont des fems ? Particulièrement des fems racisées ? Des fems racisées, handies et qui ont déjà leurs propres folies à gérer ?

• cette idée fait vraiment passer les soutenant.e.x.s pour des puissant.e.x.s et les personnes qui ont besoin de soutien pour des impuissant.e.xs, ce qui n’est pas une représentation exacte ! Ces situations sont déroutantes et complexes.

• que signifie la mort pour toi ? Et pour les personnes que tu soutiens ? Êtes-vous d’accord là-dessus, ou est-ce toi qui imposes tes croyances ? Partagez-vous des compréhensions religieuses ou culturelles sur la vie/ la mort/ après la mort/ la transition ?

• ce n’est pas absolument pas mon rôle (ni celui de personne !) de te dicter tes croyances sur la vie et la mort, ou sur l’éthique du suicide ! Tes croyances t’appartiennent. La raison pour laquelle j’aborde ce sujet, c’est parce que ces croyances vont transparaître dans tes conversations sur le suicide, que tu le veuilles ou non, donc je pense qu’il est important d’avoir conscience de tes croyances, de quelles sont tes limites, et d’être honnête là-dessus avec les personnes que tu soutiens.

Toutes ces croyances ont pour fonction de silencier et d’empêcher toutes discussions sur le suicide, à moins qu’elles aient lieu dans un cadre imposé, avec des gens en situation de pouvoir institutionnel. Ça renforce la honte et le stigma, qui sont littéralement des pressions fatales dans notre monde.

Partie 2 : les rouages – outils et stratégies pour accompagner les personnes suicidaires

a. Les principes directifs pour des discussions de soutien

Nous aborderons les stratégies concrètes dans une minute, mais d’abord, une métaphore et deux règles, qui pour moi, structurent beaucoup ma façon de me comporter dans des discussions difficiles avec les gens que j’aime.

1. Si on envisage la discussion comme un voyage en voiture, essaye de rester sur le siège passager.

La personne qui a besoin de soutien donne le rythme et la direction. Iel peut tourner en rond ou prendre une route qui n’a pas de sens pour toi. Tu es dans la voiture aussi, donc ton ressenti par rapport à votre destination compte aussi, surtout si la destination n’est pas un lieu sûr pour toi. Dans quelles conditions aurais-tu besoin de prendre le volant des mains de quelqu’un.e.x ? Réfléchis à ce que « prendre le volant » peut vouloir dire dans une discussion : donner des conseils ou des suggestions non sollicitées, poser trop de questions, ne pas laisser d’espace au silence, essayer de forcer la personne à « regarder le verre à moitié plein ».

2. La règle d’hoffman : ne panique pas, ne fais rien

(le docteur hoffman a été la première personne à me former à la prévention du suicide, il était prof d’université quand j’étais étudiant.e en stage dans un centre de soutien aux victimes d’agressions sexuelles. C’était aussi mon premier psychiatre, parce que c’est difficile de se passer de thérapie individuelle quand t’es pas hétéro, et peut être que c’est pas si mal, parfois. Dans son atelier sur le soutien aux personnes suicidaires, il commençait par dire ça : quand tu parles à quelqu’un.e.x qui a des pensées suicidaires, ne panique pas, et ne fais rien).

« Ne fais rien » ne signifie pas arrête d’interagir, ni arrête d’être soutenant.e.x, ou d’être proche de la personne – ça veut dire continue de faire les mêmes gestes d’amour et de soutien que tu ferais si la discussion ne portait pas sur le suicide ; essaye de ne pas laisser ta peur de perdre la personne t’empêcher de rester proche.

L’idée de la mort d’une personne que nous aimons peut faire paniquer notre système nerveux ! C’est compréhensible – et en même temps, ça n’aide pas. Votre discussion vous mène donc au thème du suicide ; ok, ce n’est pas radicalement différent de toutes les autres discussions que tu as déjà eues avec cette personne. Tu n’as pas besoin ici de te comporter radicalement différemment des autres types de discussions. Reste présent.e.x, sois toi-même, fie-toi à ce que tu ressens, à tes intuitions, et à ta relation avec la personne à qui tu parles. Continue de respirer, et d’écouter. Résiste à l’urgence de passer en « mode soutien » (si tu en as un – ça peut consister à changer le ton de ta voix, la posture de ton corps, et ton énergie générale). Ça ne fait généralement qu’ajouter de la distance entre toi et la personne que tu cherches à soutenir, ce qui va à l’encontre du projet de rester proche et faire preuve d’attention.

3. La règle de baker : fais quelque chose

(monsieur baker est un prof de math fictionnel d’un roman pour jeune adulte que j’adore qui s’appelle The Basic Eight, de Daniel Handler. Quand ses étudiant.e.x.s sont bloqué.e.x.s sur une question pendant un contrôle de math et qu’iels lui demandent quoi faire, il leur dit un truc du genre : tente quelque chose ! C’est ok de ne pas savoir ; en essayant, tu trouveras peut-être une partie de la réponse, ou tu apprendras peut-être quelque chose)

Tu peux faire une pause. Tu peux prendre une respiration. Tu peux dire à la personne à qui tu parles que tu as besoin d’une minute pour réfléchir à ce que tu vas dire. Tu ne diras peut-être pas la phrase parfaite, et c’est ok. Tu diras peut-être quelque chose de maladroit, ou qui soûlera la personne à qui tu parles. Tu peux t’excuser et essayer autre chose. Rate plus, rate mieux, ratez ensemble. Tout le temps que tu passes à donner un soutien imparfait et faillible à quelqu’un.e.x de suicidaire est du temps qu’iel ne passe pas à mettre fin à ses jours. Tu n’as pas besoin d’être parfait.e.x, tu as juste besoin d’être présent.e.x.

b. Les outils qui n’aident pas (essaye de les éviter)

1. S’empresser de donner des conseils/ des solutions

C’est comme ça qu’on arrache le volant des mains de quelqu’un.e.x. S’iel te demande des conseils, et que tu en as, fonce ! Mais si tu l’interromps alors qu’iel parle de sa douleur et de son manque d’espoir, pour lui proposer des solutions, tu es peut-être en train de faire tout ou une partie de ce qui suit : partir du principe qu’iel n’a pas déjà pensé ou essayé ce que tu proposes ; lui signifier que tu n’es pas capable de faire une place à sa douleur ; prendre une position d’expert.e.x qui l’invalide ; essayer de te rassurant en te donnant l’impression que ses problèmes sont « gérables ». Si tu penses avoir une suggestion réellement utile, demande avant de la donner : « hey, je connais une ressource qui pourrait aider, tu veux que je t’en parle ? » et accepte un non si on te répond non.

2. Travail de détective/ journaliste d’investigation

C’est aussi une façon d’arracher le volant. Avant de poser une question, respire et demande-toi pourquoi tu la poses. Est-ce une info dont tu as besoin ? Es-tu en train d’essayer de récolter toutes les infos dans le but d’offrir le conseil parfait ? Es-tu en train de détourner le sujet abordé par la personne ? Tu n’as pas besoin d’échafauder un plan dans un recoin de ta tête, ancre-toi, essaie d’être aussi présent.e.x que possible dans la discussion que vous avez.

3. Oublier que tu es humain.e.x

C’est une longue partie à jouer, on a donc besoin de beaucoup de joueureuses.Tu ne peux pas mettre entièrement ta vie de côté chaque fois que quelqu’un.e.x que tu aimes est en souffrance. Tu dois toujours payer ton loyer et ton boss attend probablement de toi que tu te pointes au taf de temps à autre. Tu as aussi des besoins émotionnels, des limites, des triggers. Tu as sans doute besoin de dormir et de manger régulièrement. Plus d’infos sur comment trouver, poser et respecter ses limites quand on soutient quelqu’un.e.x plus loin dans ce zine.

c. Les outils qui aident

1. Garder de l’espace, valider, être présent.e.x pour l’autre

Garder de l’espace pour l’autre signifie rester proche (émotionnellement, physiquement ou les deux) de quelqu’un.e.x qui traverse un moment difficile. L’idée n’est pas de radicalement transformer ce que ressent la personne ou ce qu’iel vit (il est fort probable que tu n’aies pas ce pouvoir), mais plutôt d’être présent.e.x, d’être proche, de prêter attention à ce qu’iel vit, et de garder un lien. Ça peut vouloir dire avoir des discussions difficiles et gérer des rancœurs, mais ça peut aussi vouloir dire faire une tarte, ou regarder une série netflix ensemble via skype. Ça peut vouloir dire laisser de la soupe devant la porte de quelqu’un.e.x, envoyer des cartes postales ou des smileys, regarder des vidéos de chatons sur youtube, jouer aux jeux vidéos, jouer au basket, faire des câlins, raconter des blagues, s’asseoir en silence, ou n’importe quel autre truc que vous faites ensemble. Être simplement proche d’une personne qui galère et ne pas essayer de changer ce qui se passe pour ellui est un acte radical de soin.

Chaque humain.e.x a différents besoins, préférences et façons de vouloir être soutenu.e.x – aucune phrase ne fonctionnera à tous les coups, et certaines phrases peuvent même rendre des gens tristes ou les mettre en colère ! La règle d’affirmation et de validation la plus importante c’est : ne dis que des choses auxquelles tu crois profondément, et utilise des mots qui sonnent vrai pour toi. La liste de la page suivante est là au cas où tu te sens bloqué.e.x, submergé.e.x ou si tu ne sais pas par où commencer.

Voici une liste d’affirmations qui peuvent aider dans une discussion avec une personne suicidaire :

je t’aime
je tiens à toi
merci de me faire confiance à ce sujet
je te crois
ça a l’air vraiment difficile
c’est vraiment nul que tu aies à gérer ça
si je peux t’aider d’une quelconque façon, je veux le faire
tu n’es pas un poids
tu comptes pour moi
tu es attachant.e.x
je t’aime même quand tu es au plus mal
je pense à toi
je suis là
j’ai choisi d’être là
merci d’avoir posé des mots là-dessus
c’est douloureusement vrai
ça craint
c’est compréhensible que tu sois à bout
wow, c’est dur
c’est violent
je me rends compte de tout ce que tu gères


Dessin noir & blanc d’un journal intime avec fermoir, sur la couverture est écrit -journal- avec un coeur transpercé d’une flèche dessiné en dessous. A côté du cahier, une clé et des stylos.

2. Poser explicitement la question du suicide

Aborder le sujet du suicide peut paraître effrayant ! Mais nous savons aussi que le silence, le stigma et la honte sont encore plus risqués. Dans un atelier, je propose quelques formulations pour parler ouvertement du suicide, et on s’entraîne, en cercle, à poser cette question à un paresseux en peluche ou un requin en plastique. S’entraîner à poser ce genre de question à voix haute peut aider, pour qu’au moment où tu voudras la poser, ça ne te semble pas si difficile ou étrange. Tu peux avoir l’impression que poser cette question, c’est maladroit, dérangeant, effrayant, inapproprié ou envahissant. Je t’encourage à rejeter les normes sociales qui voudraient garder ce sujet sous le tapis, et de poser quand même la question. Tu trouveras plus bas différentes façons de formuler cette question, mais tu peux utiliser n’importe quel langage qui a du sens pour toi et la personne à qui tu parles – du moment que vous captez touxtes les deux de quoi vous parlez ! De nouvelles recherches indiquent que ces questions sont mieux reçues lorsqu’elles sont exprimées avec sollicitude. Encore une fois, lorsque tu parles ouvertement de suicide, utilise le langage avec lequel tu es le plus à l’aise, mais aie aussi conscience qu’il est normal de ressentir un malaise en brisant cet immense tabou, particulièrement si tu n’en as pas (encore) l’habitude.

• je suis assez inquiet.e.x pour toi. Est-ce que tu penses à mettre fin à tes jours ?

• hey copaine, je voudrais te demander, est-ce que c’est d’envie suicidaire dont on est en train de parler ?

• je suis à tes côtés pendant ce moment difficile et je tiens très fort à toi. Je me demande, est-ce que tu envisages de te suicider ?

• tu sais, je m’inquiète pour toi aujourd’hui, et je veux te soutenir du mieux que je peux. C’est ce qui me pousse à te demander, est-ce que tu ressens l’envie de quitter ce monde ?

• parfois, lorsque j’ai entendu des personnes dire le même genre de choses que toi, ces personnes pensaient au suicide, est-ce que c’est aussi ton cas ?

• je sais que parfois tu as envie de mourir, est-ce que c’est le cas en ce moment ?

(questions auxquelles il faut faire attention, parce que ce ne sont pas exactement les mêmes)

• Envisages-tu de te causer de la douleur ?

• Envisages-tu de te blesser/ de t’automutiler ?


Note de traduction : Il est question de la différence entre vouloir ressentir de la douleur et vouloir se causer des blessures, faire quelque chose qui aura des conséquences néfastes pour soi. Alors que la souffrance peut venir de pratiques sans risque, ne causant pas forcément des dommages de santé.

(questions auxquelles il faut faire attention parce qu’elles induisent une certaine réponse, ou font comprendre aux personnes quelle réponse tu veux entendre)

• Tu ne penses quand même pas au suicide ?

• Est-ce que je dois m’inquiéter pour toi par rapport au suicide ?

Si tu n’as jamais posé ce genre de questions avant, essaye de trouver un cadre sans risque (sous la douche, devant ton miroir, face à un animal ou une plante) pour en poser une (ou plusieurs) à voix haute. Même en l’absence d’humain.e.x concerné.e.x, ça peut être dur, donc s’il te plaît respecte ce que tu ressens en le faisant, fais attention à toi et/ou demande l’attention dont tu as besoin. Si tu ne sais pas par où commencer pour prendre soin de toi, tu peux essayer de boire un verre d’eau ou de thé, faire de la respiration consciente (sans essayer de modifier ou contrôler ta respiration, mais simplement en y prêtant attention), demander un câlin, prendre un goûter, ou une douche.

L’ensemble des pressions qui font que c’est difficile pour les soutenant.e.x.s de poser clairement et explicitement ces questions, poussent *aussi* les personnes suicidaires à ne pas aborder le sujet, ou à ne pas demander de l’aide (sauf si ça vient d’un.e professionnel.le.x de santé mentale en vue qui a le pouvoir de les enfermer pour avoir exprimé ça à voix haute). Je conçois ça comme un travail d’équipe – on vire le stigma et le silence pour permettre à l’autre personne de ne pas avoir à le faire. Le simple fait de prendre en compte ce vécu, et que quelqu’un.e.x d’autre le reconnaisse sans paniquer ni se braquer, c’est une immense opportunité de créer du lien – une sorte de soupape de décompression pour une souffrance qui a été réduite au silence. Offrir la possibilité à quelqu’un.e.x de parler du suicide est une intervention hyper puissante et généreuse.

Certaines personnes craignent que demander à quelqu’un.e.x s’iel pense au suicide soit une question coercitive, et que ce ne soit pas ok de forcer quelqu’un.e.x à parler du suicide.

Je suis d’accord avec la seconde partie, mais pas avec la première ! Une question n’est pas un ordre, si la personne à qui tu poses la question ne veut pas parler de ses pensées suicidaires, iel peut le dire, ou iel peut mentir et dire qu’iel ne se sent pas suicidaire ! La question peut paraître intense, et parfois les gens sont surprixes de l’entendre formulée ouvertement, parce que la plupart des gens ont super peur de prendre conscience de cette possibilité.

Il m’est souvent arrivé (et à beaucoup d’autres) que la première fois que je pose cette question à quelqu’un.e.x, iel s’empresse de dire non, que ce soit vrai ou pas. Mais à partir de ce moment-là, la personne sait que tu es quelqu’un.e.x qui n’a pas peur d’engager la conversation sur le suicide, et la graine pourra germer plus tard, quand iel aura de nouveau besoin de soutien, ou voudra ton soutien en particulier.

Si la première fois que je demande à une personne s’iel pense au suicide, iel dit non très vite, ou que son « non » me laisse une drôle d’impression, je poursuis parfois en expliquant brièvement comment je conçois la prévention du suicide, pour que la personne puisse décider en connaissance de cause s’iel veut que je lae soutienne, maintenant ou plus tard. Pour moi, cette phrase peut ressembler à ça : « histoire que tu saches, si un jour tu y penses et tu veux en parler, je n’appellerai jamais les keufs ». Cette phrase peut ne pas être la même pour toi, tes limites et tes valeurs peuvent être différentes des miennes, et c’est totalement ok – mais ça peut être utile d’avoir en tête une ou deux phrases qui présentent tes valeurs et ton approche, pour que les personnes sachent comment tu te positionnes.

3. Parler de sécurité / traverser un moment de crise

Quand quelqu’un.e.x est en crise, il y a de grandes chances que tu ne puisses pas agir sur les racines de cette souffrance, changer radicalement les choses qui l’ont mené.e.x à cette situation, ou faire un plan sur le long terme pour améliorer les choses. L’idée est juste de survivre à une période vraiment horrible.

Le corps de la plupart des gens ne peut pas supporter un état aigu de crise de panique plus de vingt minutes, donc les tactiques de gestion de crises sont majoritairement classées en deux catégories :

• essayer de diminuer un peu le niveau de souffrance, et/ou

• laisser passer assez de temps pour que le niveau diminue de lui-même

Si on repense à la métaphore du voyage en voiture, les crises sont des moments où conduire est très difficile, et la personne en crise pourrait apprécier que tu prennes le volant pour un bref instant. Fais de ton mieux pour rester calme, et concentre-toi sur la route devant toi.

Le *meilleur* moment pour faire un plan de crise, c’est quand la personne n’est pas en pleine crise, donc je recommande fortement de bosser dessus avec des personnes que tu aimes, à un moment un peu plus calme. Penser que parler de suicide est intrinsèquement dangereux nous empêche de planifier les crises, parce qu’on a peur qu’aborder le suicide puisse *causer* une crise. Si tu fais un plan avec quelqu’un.e.x qui n’est pas en crise, ou que tu fais un plan pour toi-même, voici quelques questions pour t’aider à te lancer.

• comment ça se manifeste, quand tu ne vas pas bien ?

• qui tu tolères autour de toi quand tu vas mal ?

• quelle forme de soutien t’aide quand tu vas mal ? Quelle forme de soutien est inutile, ou même néfaste ?

• quelles activités peuvent t’aider à passer le temps, pendant un moment de grande souffrance ?

• qui sont les personnes sur qui tu peux compter pour répondre rapidement aux sms, au téléphone, ou pour venir ?

• est-ce que tu as noté les noms et numéros de téléphone de personnes de soutien importantes (ami.e.x.s, famille, thérapeute, ligne d’aide) à un endroit où tu peux facilement les retrouver (sur le frigo ? Dans ton portefeuille ?)

Si tu soutiens une personne pendant un moment de crise, et que tu n’as pas de plan, ou pas accès au plan qui pourrait exister, voici quelques questions pour commencer.

• si tu t’es déjà senti.e.x comme ça, qu’est-ce qui t’as aidé à traverser ce moment ?

• qui sont les personnes en qui tu as confiance pour parler, demander de l’aide, être près de toi ?

• y a-t-il un endroit où tu peux te poser ? Est-ce que je peux/nous pouvons faire quelque chose pour que ça soit plus confort, plus safe, mieux, etc ?

• y a-t-il des choses/ gens/ objets/ médicaments/ endroits que tu veux éviter ? Comment je peux t’aider avec ça ?

• est-ce qu’il y a des besoins corporels de base qui, une fois satisfaits, te feraient te sentir 1 % moins mal ? Boire de l’eau, manger, prendre une douche, faire ta toilette avec une lingette pour bébé, des habits plus chauds, une couverture en plus, un ventilateur, des respirations profondes, prendre l’air, des étirements, etc.

• as-tu dormi récemment ? Mangé ? Vu taon thérapeute/ acupuncteureuse/ astrologue/ travailleureuse du sexe/ n’importe quel genre de guérisseureuse que tu vois en ce moment ?


Dessin en noir & blanc d’un portable qui reçoit un appel

Note sur les stratégies de gestion « risquées » et la réduction des risques

Parfois, la meilleure stratégie d’une personne pour traverser un moment vraiment atroce, c’est de faire quelque chose qu’en tant que soutien, tu peux percevoir comme dangereux (ex : automutilation, boire de l’alcool, prendre des drogues). C’est logique de s’inquiéter de ces risques quand quelqu’un.e.x est suicidaire, mais les gens utilisent ces stratégies parce qu’elles fonctionnent, au moins à court terme. Je veux que nous ayons touxtes une meilleure boîte à outils où piocher quand on traverse une crise, mais je ne veux pas retirer ce qui pourrait être le seul outil d’une personne, sous prétexte que je le juge trop dangereux. Il est aussi important de ne pas juger les stratégies que quelqu’un.e.x utilise pour survivre. La honte ne pousse pas les gens à changer leur comportement. La seule chose que fait la honte, c’est pousser les gens à cacher leur stratégie risquée, et toute chose risquée l’est encore plus quand elle est faite dans l’isolement ou le secret. J’essaye d’aborder ces stratégies de gestion dans une perspective de réduction des risques. Voici deux stratégies de réduction des risques à tenter :

Retarder. Vois si la personne que tu soutiens peut attendre 5 minutes ou 5 respirations avant de décider s’iel veut utiliser une stratégie de défense risquée. Une autre tactique de retardement est de voir s’iel serait ok pour essayer deux ou trois stratégies moins risquées avant, et ensuite tenter l’option risquée, si aucune autre n’a fonctionné et que la situation n’a pas changé. Pour une personne qui veut boire de l’alcool, je lui suggérerais de boire un verre d’eau gazeuse ou plate, ou de prendre un shot de vinaigre de cidre, avant de se servir une boisson alcoolisée. Pour une personne qui veut se couper, je lui suggérerais de dessiner sur l’endroit où iel veut se couper au marqueur rouge, ou de claquer un élastique sur sa peau, ou d’arracher les poils de cette zone avec une pince à épiler, avant de se couper.

Réduire les risques de blessure grave. Si quelqu’un.e.x arrive au point où une stratégie risquée est la seule chose qui semble pouvoir réduire leur souffrance sur le moment, vois si tu peux au moins rendre cette activité un peu plus safe. Pour une personne qui veut se couper, essaye de t’assurer qu’iel a des lames propres, des compresses stériles, du savon et de l’eau, et un contenant sécurisé pour mettre les lames utilisées, et idéalement, qu’iel soit sobre et ne soit pas seul.e.x quand iel se coupe. Pour une personne qui veut boire de l’alcool, vois s’iel peut avoir un.e.x ami.e.x sobre avec ellui, s’iel peut prendre un taxi plutôt que de conduire son vélo/ sa voiture, s’iel veut bien boire chez ellui plutôt que dehors n’importe où, qu’iel ait un moyen sûr de rentrer chez ellui s’iel sort. Pour une personne qui veut prendre des drogues, vois s’iel a un kit de naxolone, un.e.x ami.e.x sobre, un kit pour tester ce qu’iel prend, surtout si c’est du fentanyl, s’iel a une source sûre d’approvisionnement, s’iel prend des drogues injectables, essaye de t’assurer qu’iel a du matériel propre, et/ou accès à une salle de consommation près de chez ellui.

4. Poser des limites

Ok. Connaître nos limites et comment les respecter est une phase d’apprentissage assez intense, et je doute que ce soit un travail qui puisse être terminé un jour. Respecter ses limites peut être difficile en toutes circonstances, mais c’est particulièrement compliqué quand on a l’impression que la vie de quelqu’un.e.x est littéralement en jeu. Le truc c’est que : ce n’est pas ton taf de maintenir quelqu’un.e.x en vie. Prends une grande respiration, et relis cette phrase, ou dis-la à voix haute. Ce n’est pas ton taf de maintenir quelqu’un.e.x en vie. Et parfois, tu ne peux pas. Si ça t’arrive un jour, ou que ça t’es déjà arrivé, ce n’est pas de ta faute. Réellement, sincèrement. Ce n’est pas de ta faute. Tu peux aussi dire cette phrase-là à voix haute : ce n’est pas de ma faute.

J’en suis venu.e à penser que la chose la plus bienveillante et soutenante que tu puisses faire, c’est d’être aussi honnête et réaliste que possible sur ce que tu es capable de faire, puis de tenir tes engagements.

Prends le temps de réfléchir à tes précédentes expériences de soutien, et pense à comment tu t’es senti.e.x (émotionnellement, mais aussi comment tu t’es senti.e.x dans ton corps) quand tu dépassais tes capacités, ou tes limites. Est-ce que tu peux lister les émotions et les sensations qui te signalent que tu as atteint une limite ? Celles qui t’indiquent que tu as déjà dépassé une limite depuis un moment et que tu as besoin de soutien ? J’espère qu’avec le temps, nous saurons identifier quand on se rapproche, mais qu’on n’a pas encore dépassé nos limites, pour pouvoir aussi gérer la partie « poser des limites » à un moment où on va encore à peu près bien, et où on a accès à nos capacités et ressources. Nous sommes capables de poser des limites avec plus de douceur et d’habileté si on le fait avant de ne plus se sentir bien.

Pour moi, mon signal numéro un c’est la rancune. Si je me rends compte que j’en veux à quelqu’un.e.x (que j’aime évidemment profondément, puisque je suis investi.e dans son soutien) ça veut dire que je suis au-delà de mes capacités, et qu’il faut que je trouve un moyen d’obtenir plus de soutien. Est-ce que tu connais tes signaux ? Est-ce que tu te sens en capacité de les identifier et d’essayer au mieux d’honorer tes besoins ?

Ça peut sembler évident en théorie, que les limites sont positives, saines et souhaitables, mais dans les moments où on se sent submergé.e.x ou trop imliqué.e.x, on peut avoir besoin de davantage d’encouragements et de force pour poser et tenir nos limites. mes raisons de respecter nos limites en tant que soutiens sont doubles :

Deux arguments en faveur de limites solides pour les soutiens :

• le soutien qu’on offre est meilleur quand on agit dans notre zone de capacités. Quand on fait uniquement ce qui nous semble possible et ok (et pas nécessairement facile ou fun !), notre soutien est perçu comme aimant, sincère, véritable et généreux. Quand nous sommes au-delà de nos limites, le soutien qu’on tente d’offrir malgré cela peut être perçu comme amer, forcé, à contrecœur, ou juste moins efficace. Avoir des limites et s’y tenir est bénéfique pour notre travail de soutien et pour les personnes que nous soutenons.

• établir des limites est un exercice qui aide à construire de la confiance. Autrement dit, entendre un « non » de ta part peut rendre ton « oui » plus crédible. Certain.e.x.s personnes suicidaires s’inquiètent d’en demander trop, ou d’être un poids. S’iels savent que tu diras non à quelque chose qui n’est pas ok pour toi, iels seront beaucoup, beaucoup plus libres de te dire réellement ce qui peut les aider. Autre chose que j’ai souvent vu, c’est des soutiens qui prennent trop d’engagements parce qu’iels s’inquiètent pour quelqu’un.e.x, et lorsqu’iels réalisent ensuite qu’iels ne peuvent pas respecter leurs engagements, iels se retrouvent bloqué.e.x.s dans une spirale de honte, et soit iels disparaissent, soit iels s’en prennent aux personnes qu’iels soutiennent. C’est totalement ok de revenir sur un engagement que tu as pris et que tu ne peux plus tenir (il faut en prendre conscience et si tu peux, aider à mettre en place un nouveau plan pour combler le besoin), mais c’est mieux de s’apercevoir que tu atteins une limite ou que tu sais que ça va arriver, et de n’accepter que ce qui te semble possible et ok pour toi.

Un exemple de limite que je respecte maintenant, mais que je ne respectais pas quand j’avais moins d’expérience en soutien face au suicide (et que je recommande aussi aux autres de réussir à respecter) c’est : je ne serai pas lae seul.e à savoir que quelqu’un.e.x a des idées suicidaires. Mon scénario idéal serait qu’on soit une équipe de personnes qui se tiennent au courant, qui se soutiennent les un.e.x.s les autres, prennent des pauses, partagent des informations et des stratégies, etc. Mais pour moi c’est aussi ok de ne pas être en contact avec une autre personne qui offre du soutien, ou même si cette deuxième « personne » est une ligne téléphonique de soutien. Mais j’ai besoin de savoir que si je suis injoignable (par exemple, parce que je dors, travaille, prends le thé avec quelqu’un.e.x ou que je suis en plein rituel ou cérémonie) alors la personne qui a besoin de soutien peut (et va !) joindre quelqu’un.e.x d’autre.


Dessin en noir & blanc d’une feuille de papier contenant une to-do liste avec un stylo posé à côté

Deux stratégies pour poser des limites dans des situations de soutien :

• proactive : fais des propositions à choix multiples ! Prends en considération la relation que tu as avec la personne que tu soutiens, tes aptitudes, le genre de choses que vous faites ensemble, tes capacités/ ton énergie sur le moment, et propose trois choses que tu es prêt.e.x et capable de faire (ex : je peux venir chez toi avec un poulet rôti, tu peux venir dormir chez moi ce soir, je peux passer pour toi ces appels administratifs flippants pour que tu puisses avoir un rdv avec un.e thérapeute. Est-ce qu’une de ces choses serait aidante ?). Pour une personne en détresse, il peut être plus simple d’accepter une offre spécifique plutôt que d’essayer de répondre à une question comme « de quoi as-tu besoin ? » ou « comment je peux t’aider ? » Iel peut toujours demander un aide différente de celle que tu as proposé, mais les propositions peuvent lui donner une idée du genre de choses que tu es capable et prêt.e.x à faire.

• réactive : si quelqu’un.e.x demande quelque chose que tu ne peux pas ou ne veux pas faire, réponds « non, MAIS », plutôt que juste non. Non, mais essayons de trouver quelqu’un.e.x d’autre qui peut faire ça pour toi ou avec toi/ non, mais je peux faire cette autre chose/ non, mais je comprends totalement que tu aies besoin de ça, est-ce qu’on peut trouver une autre manière d’y arriver ?


Une personne debout et de profil, des cheveux longs attachés en queue de cheval, habillé’e d’un short, un débardeur et une casquette, câline un chat dans ses bras. Dessin en noir & blanc

Partie 3 : à lire/ regarder/ écouter pour en savoir plus

(ressources francophones, les pages anglophones sont dispo sur la version anglophone du zine)

 directives anticipées pour une crise (bipolarité)
commedesfous.com/directives-anticipees/

 self care pour les crises de colère
coupsdegueuledelau.wordpress.com/2017/11/26/self-care-pour-crise-de-colere/

 « ceux qui parlent de suicide ne le font pas » débunkage
https://coupsdegueuledelau.wordpress.com/2016/06/09/ceux-qui-parlent-de-se-suicider-ne-le-font-pas-demontage-dun-mythe-dangereux/

 éloge de la paire-aidance
coupsdegueuledelau.wordpress.com/2017/09/17/oui-les-fous-folles-peuvent-sentraider/

 influences des oppressions systémiques sur le suicide
https://www.zinzinzine.net/au-sujet-du-suicide-et-de-la-depression.html

 la théorie de la femme malade, Hedva
https://lesoursesaplumes.info/2020/03/12/la-theorie-de-la-femme-malade/

 personnes trans et suicide
https://www.mentalhealthcommission.ca/wp-content/uploads/drupal/2019-05/Les%20personnes%20transgenres%20et%20le%20suicide%20-%20Fiches%20d%E2%80%99information.pdf

 personnes LGBT et suicide
https://stopsuicide.ch/wp-content/uploads/2017/07/Publications_STOP_Suicide_et_LGBT.pdf

 TDS et suicide
https://strass-syndicat.org/vingt-annees-nefastes-pour-les-travailleuses-du-sexe-modele-suedois-fuckforbundet/

podcast et vidéos :

 espoir mode d’emploi TEDx
https://www.youtube.com/watch?v=ihZXyIa0AJc

 suicide et transidentités
https://www.youtube.com/watch?v=5v468SHGxdM

 en parler peut tout changer
https://open.spotify.com/show/0IkKksScT72cANf1s0jwYW?si=48b588ad00764d24

livres :

 Rognon, Frédéric. Penser Le Suicide Actes Du Colloque International Et Interdisciplinaire Tenu à Strasbourg Les 17 Et 18 Novembre 2016. 2018

 Nicolas, Caroline, and Monique Séguin. Suicide Et Environnement Organisationnel Facteurs De Risque Et Pistes De Prévention. 2015.

ressources :

 élaborer un plan de sécurité quand on est multiple
https://www.partielles.com/img-plan-de-securite/

 linktree de @clem.ciel, aka bipolairemilitant, avec plusieurs ressources de gestion de crise pour soi et pour les autres
https://linktr.ee/bipolaire.militant

 brochure de cartografolie pour aider à gérer les crises
https://www.zinzinzine.net/brochure-de-cartographolie.html

 que faire en cas de crise suicidaire ?
https://www.instagram.com/p/CUK4Wi1AhaR/


Remerciements de carly boyce

Okay, donc l’objet que tu tiens entre tes mains n’existerait pas sans le soutien d’une vaste communauté. Je veux particulièrement remercier les bébous qui m’ont encouragé à faire de ce truc un vrai truc – cee lavery (extraordinaire illustrateurice), julia sinclair-palm (magicien.ne de la mise en page), et noah eidelman. Merci merci merci <3 ! Merci aussi aux trois personnes minutieuses et attentionnées qui m’ont aidé à éditer – jody chan, kali greve, et meg leitold.

Je veux aussi remercier les « superbabes » de la justice handi, qui m’ont aidé à construire des ateliers de prévention sur le suicide dans un premier temps – arti mehta et leah henderson. Votre génie et votre prévenance sont magiques. Aussi, une dédicace à jess montebello, qui m’a laissé utiliser d-beatstro pendant des heures pour accueillir ces ateliers mensuels en 2016/17, et à tous les espaces radicaux qui m’ont invité afin d’avoir ces discussions compliquées.

À chaque personne qui est venue à un de mes ateliers, et a partagé son histoire et ses outils avec moi et les autres – merci.

Ce zine, et genre tout ce que je fais, repose sur ce que j’ai appris sur l’autonomie corporelle, le consentement, l’intégrité, et en travaillant dans des systèmes tout en niquant ces systèmes, et ces leçons viennent de leatherdykes, de fems queer et handies, de femmes trans, et de travailleureuses du sexe. Je vous dois tout.

Remerciements d’ezekiel

Je remercie la communauté handi queer qui m’a sauvé la vie de multiples fois, par des actes de paire-aidance plus ou moins conscientisé.

Merci aussi à carly boyce pour ce zine qui, avec La théorie de la femme malade de Joanna Hedva, sont les textes qui ont le plus bouleversé ma perception de moi-même et de mes adelphes suicidaires. Merci aussi de m’avoir laissé traduire ce zine !

Merci à marion, mawie, ina et anna, pour leurs relectures, leurs conseils, et leur soutien.

Merci surtout aux ami.exs qui m’ont soutenu dans mon hyperfixation sur ce zine, et qui m’écoutent infodump tous les jours sur mon intérêt spé sur l’antipsychiatrie, la paire-aidance et les neurodivergences, vous êtes super <3

Une main tient une lanterne, devant cette lanterne, un ruban jaune porte l’inscription "Tiny Lantern"

carly boyce 2019 tinylantern.net

Traduction par
ezekiel & the weirdos 2022

Publié sur zinzinzine.net : https://www.zinzinzine.net/aider-vos-ami.e.x.s-qui-ont-parfois-envie-de-mourir-a-ne-peut-etre-pas-mourir.html



ce texte est aussi consultable en :
- PDF par téléchargement, en cliquant ici (1.8 Mo)
- PDF par téléchargement, en cliquant ici (1.7 Mo)